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Par Fabien Assigana, Président National du Mouvement Républicain (MOREP)

Sujet : actualité nationale, grogne chez les anglophones, mes lectures de la semaine

Les manifestations que nous vivons depuis quelques jours dans la ville de Bamenda ne rassurent pas. Le vieux script de la déstabilisation est déjà bien connu tellement il a été déployé plusieurs fois ailleurs avec «succès». J'espère qu'il s'agit la d'une fausse alerte, car voici le contenu du script:

1/ Ça commence toujours par une simple manifestation populaire ;

2/ Puis des agents de la CIA, la DGSI ou des mercenaires s'infiltrent dans la foule et tirent sur la population, et on attribue alors le crime aux forces de l'ordre et donc au régime qu'on essaie de déstabiliser ;

3/ Les medias complices (France24, TV5, RFI, CNN, etc.) s'emparent de la situation et amplifient les choses par une propagande malsaine comme ils savent si bien le faire ;

4/ Ensuite on court au conseil de sécurité de l'ONU voter une résolution pour une intervention militaire ;

5/ On déploie des casques bleus sur le terrain, ou alors l'ONU sous-traite la mission a l'armée française ;

6/ Ça se termine comme en Cote d'Ivoire et en Libye, etc. ;

7/ Le pays est déstabilisé à jamais avec plusieurs centaines de milliers de morts, les casques bleus ou soldats français qui ont parmi eux des ingénieurs et autres experts pillent les matières premières et ne quittent plus jamais le pays, le cas de la RD Congo.

Ceci peut être démontré par le timing du mouvement d’humeur. Juste au moment où le ‘‘Cameroun’’ organise un événement international tel la CAN féminine 2016, çà commence par la grève des avocats, puis par celle des enseignants, enfin une quasi insurrection avec apparition du drapeau des séparatistes.

Vous remarquerez que les populations du Sud-Ouest ne se sont pas rendues au stade de Limbé pour vivre les matchs de la CAN féminine. Le beau spectacle sur l’aire de jeu se passe avec des gradins vides. Pour un pays de football comme le nôtre c’est une honte. Il ne se passait plus un seul jour à Bamenda sans que des manifestations ne soient organisées pour dénoncer le problème anglophone. Meme le charismatique leader du SDF, John Fru Ndi, a failli se faire lyncher par cette population enragée alors qu’il est sorti pour tenter de calmer les manifestants. Mais au final, si ceux qui étaient dehors continuait dans leur dangereux mouvement, ils allaient dans le pire des cas trouver la mort, et dans le meilleur des cas devenir des réfugiés quelque part dans un pays voisin n'ayant rien obtenu de tout ce qu’ils réclamaient et en train de conjuguer le verbe "si je savais". Heureusement pour notre cher beau pays, le Cameroun, que cette énième tentative de déstabilisation a échoué car,  le mouvement n’a pas fait long feu.

Tout camerounais est a la fois «anglophone» et «francophone» (pour ceux qui aiment utiliser ces qualificatifs). Nous somme tous camerounais, filles et fils d’un seul et même pays, alors restons vigilants, protégeons notre pays! Le problème aujourd'hui au Cameroun n'est plus de sauvegarder les acquis coloniaux mais de créer des modèles judiciaires, économique, managériaux, éducatifs qui cadrent à la vision commune et qui militent pour l'Unité Nationale et le développement harmonieux et durable! Anglophones, Francophones ce sont des héritages coloniaux qu’il va falloir secouer pour ne garder que ce qui est bien et l'adapter à notre organisation sociétale. Nous tendons vers le bilinguisme au-delà de la langue. Le Fédéralisme dans le Cameroun actuel sera une porte ouverte au tribalisme et à rien d'autre, soyons honnête avec nous-mêmes. Il ne s'agira plus de deux États fédérés mais des États-tribaux. Et quand les assemblées fédérées mettront sur pieds les lois, de préférence tribale, il faudra aussi applaudir.

Ceux qui croient connaître le Nigeria à partir de Nollywood doivent savoir que ce type de lois existe là-bas, où par exemple on demande que 60% des emplois soient réservés aux fils et filles du terroir etc. Croyez vous que les populations allogènes se seraient installés si facilement et si librement dans d'autres zones dans un pays fédéral surtout avec nos mentalités? Que ceux qui partent prendre les exemples aux USA reviennent sur terre, nos mentalités ne sont pas occidentales mais nègres.

La grève des ‘‘Common Law’’ lawyers

Tout a commencé par la grève des avocats ‘‘anglophones’’. Il est certain que le CIMA code, les traites OHADA ainsi que les textes afférents ne sont pas applicables au Cameroun. En effet, la constitution du Cameroun en vigueur pendant la période relative, dispose que tout instrument international en conflit avec la constitution ne peut être ratifié qu’après la modification de la constitution pour l’arrimer à la disposition de l’instrument international conflictuelle. Or, les instruments précités disposaient que la seule langue applicable était le français. Le Cameroun étant bilingue selon la constitution, telle disposition était en conflit avec la constitution. Il va sans dire que la ratification intervenue sans la modification préalable de la constitution était anticonstitutionnelle : autrement dit, lesdits instruments ne sont pas encore ratifiés.

Peu importe que lesdits instruments étaient modifiés par la suite pour admettre d’autres langues, y compris l’anglais. Il était impératif que le Cameroun fasse la ratification après ladite modification ; car il n’y avait plus de conflit. La modification desdits instruments après la ratification anticonstitutionnelle par le Cameroun ne pouvait avoir pour effet la régularisation de la ratification anticonstitutionnelle antérieure. Quoi qu’il en soit, même si lesdits instruments étaient régulièrement ratifies, le grief des Common Law lawyers a pour base l’absence des versions anglaises de ces instruments depuis une décennie. Ceci est exacerbé du fait que toutes demandes desdites versions auprès du gouvernement sont restées lettres mortes. Le gouvernement camerounais a déclaré maintenant que la traduction desdits instruments est en cour.

Mais le Cameroun ne peut régulièrement traduire la version française en anglais faute d’authenticité da la version ainsi traduite car, la seule version authentique en anglais reste celle de OHADA revêtue des signatures des États membres. En cas de conflit entre la version ainsi traduite et la version authentique, il est de droit que c’est la version authentique qui prévaut. En fin de compte, la traduction ne saurait résoudre les griefs des Common Law lawyers.

On ne peut ne pas conclure que se fondre sur le fait que le gouvernement du Cameroun est en train de traduire ces textes ne peut constituer le début de solution de la grève des Common Law lawyers. Le problème de base est d’abord l’inertie du Président de la République qui est en fait dénoncée, et cette inertie enfonce le pays de plus en plus dans le chaos.

En réalité, y-a-t’il vraiment un problème anglophone au Cameroun

À mon avis, il faut annuler la chimérique problématique anglophone.

Il s'agit de faire du soi-disant problème anglophone un problème camerounais tout court, en leur enlever leur cachet tribal d'une puanteur exécrable et annonciatrice de lendemains incertains et possiblement chaotiques. Il s'agit aussi d'éviter que la question centrale de l'émancipation du Cameroun ne soit noyée dans des querelles créées de toutes pièces par les puissances d'argent afin de nous éloigner du premier de nos objectifs. Le problème Duala doit être posé, tout comme doivent être posés les problèmes Mbororo, Bassa, Bamiléké, Banen, Tupuri, Tikar, Kirdis, arabes Choas, pygmées, Bafia, Babanki, etc. C'est la seule façon d'éliminer la stigmatisation anglophone. C’est après avoir posé tous les problèmes singuliers qu'on se rendra finalement compte que leur résolution passe par une action concertée de tous les ayants droit du Cameroun. Il faut nullifier le problème anglophone qui encombre les espaces discursifs et politiques et ne laisser dans notre champ d'action collectif que le problème camerounais.

Le grand malentendu camerounais

En octobre 1961, les deux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, réunies sous l’appellation de Southern Cameroons votaient leur rattachement à la partie francophone du territoire, elle-même indépendante depuis le 1er janvier 1960. Dix ans plus tard, le système fédéral est remplacé par voie référendaire, et le 20 mai 1972, la république Cameroun fédérale devient la « République unie », et d’aucuns diraient, par la seule volonté du pouvoir central de Yaoundé. Ainsi naquit le grand malentendu camerounais. Tandis que les francophones se félicitaient de cette unification, exaltant la naissance d’un État nation, les anglophones, qui avaient leur gouvernement, leur justice, leur administration et leur culture, hérités de la colonisation britannique, craignirent très vite de perdre leur identité. D’autant que l’autoritaire Ahmadou Ahidjo s’empressa de liquider ce qui restait de l’indirect rule, régime qui, pendant la colonisation, régissait les rapports entre autochtones et représentants de la Couronne, et dont le principal avantage était de laisser les Camerounais s’autogérer. Imposé par le pouvoir, le nouvel État unitaire, fortement centralisé sur le modèle jacobin, devint le seul lieu de décision.

«Le processus de centralisation du pouvoir qui a vu les deux États fédérés du Cameroun oriental et du Cameroun occidental se fondre en République unie, en 1972, est finalement apparu aux anglophones comme une politique d’assimilation culturelle à leur encontre par la majorité francophone.»

Depuis lors et à chaque fête nationale, ‘‘les anglophones’’ appellent, en agitant le spectre de la violence, à la création de l’État de l’Ambazonie. En effet, les revendications seront d’abord d’ordre culturel. Le Cameroun est un pays bilingue, mais les anglophones s’insurgent contre l’obligation qui leur est faite de parler le français, même dans leur région, alors que l’inverse ne s’applique pas aux francophones. Puis, tout cela se déplace sur un terrain politique: ils s’estiment sous-représentés dans les différentes sphères de l’État.

Lorsque devenu président en 1982, Paul Biya décide, deux ans plus tard, de modifier la Constitution, et de supprimer l’adjectif «unie» et de revenir à l’appellation République du Cameroun (le nom du Cameroun francophone avant la réunification), c’est la bronca chez les «anglo», comme on les appelle dans le pays. Plusieurs mouvements se forment pour revendiquer la partition.

Ce problème remonte à 1961 quand les élites politiques de deux territoires avec des legs coloniaux différents l’un français  et l’autre britannique sont tombés d’accord pour former un État  fédéral. Contrairement aux attentes des anglophones, le fédéralisme  n’a pas permis une parité stricte pour ce qui concerne leur héritage culturel et ce qu’ils considèrent comme leur identité d’anglophone. I1 s’est révélé n’être qu’une phase transitoire de l’intégration totale de la région anglophone dans un État unitaire fortement centralisé.

À ce jour, les événements successifs qui surviennent durant les célébrations des anniversaires de la réunification en 1961 des Cameroun anglophone et francophone au sein d'une même fédération, et rappellent crûment les difficultés du législateur camerounais à consolider son projet d'État-nation. Les questions à colorations identitaires ne cessent de diviser le pays et  la symbiose a du mal à s'installer entre les deux entités culturelles. Ce point de vue n'est rendu possible que si nous jetons un regard rétrospectif dans l'histoire de ce pays.

Par le traité du 12 Juillet 1884, le Cameroun était devenu un protectorat allemand. Ce pays sera successivement sous mandat de la Société des Nations en 1918 et sous la tutelle de l'ONU le 19 décembre 1946 et administré respectivement par la France et la Grande Bretagne. Ces deux puissances colonisatrices vont imprimer leur politique dans la gestion des deux Cameroun Le Cameroun, divisé en deux zones, devient ainsi un objet de droit international. Dès lors, une mission sera assignée à la France et à la Grande Bretagne par l'ONU. C'elle de préparer les camerounais à une autonomie avancée et à une indépendance totale avec le stricte respect de la dignité humaine et des libertés fondamentales. Apparaissant comme une entité étatique il obtint son indépendance le 1er Janvier 1960. Déjà en 1959, dans la résolution 1350 (XIII) du 13 mars 1959, l'Assemblée Générale des Nations Unies demande que l'autorité administratrice du Cameroun organise sous la surveillance de l'ONU, des plébiscites séparés dans la partie septentrionale et dans la partie méridionale du Cameroun sous administration britannique " afin de déterminer les aspirations des habitants du territoire au sujet de leur avenir ". Ces plébiscites séparés, organisés les 11 et 12 février 1961 ont été remportés par les partisans de l'unification par 237 575 voix contre 97 741 voix pour le ralliement au Nigeria.

De ces résultats obtenus, un projet constitutionnel viendra faire prévaloir un Etat fédéral avec une Constitution très centralisée en lieu et place d'une province autonome tel que l'avait souhaité le public anglophone. Les deux Etats fédérés s'étaient ensuite fondus dans une République unie après un référendum en 1972, avant que le pays ne prenne son appellation actuelle de République du Cameroun à l'avènement de Paul Biya en 1982. Le pays avait ainsi achevé le processus de démantèlement de la "République fédérale du Cameroun", qui regroupait les Etats anglophones et francophones hérités de la victoire militaire des "Alliés" sur le colonisateur allemand, en 1916.

 «La fameuse politique d’intégration nationale a été sciemment conçue pour assurer notre annihilation. Il est inadmissible que les anglophones soient traités comme des citoyens de seconde zone. Dans ces conditions, nous considérons que l’indépendance est la seule voie possible», tempête, en anglais, Mola Njoh Litumbé, le leader du Southern Cameroons National Council SCNC), du haut de ses 85 ans.

Les sécessionnistes estiment que dans le cadre de l'État unitaire, les différents gouvernements font la part belle aux francophones, que ce soit dans le développement socio-économique ou dans la gestion des ressources humaines. D'où leur décision de maintenir la Southern Cameroons National Council (SCNC) sorte d'assemblée représentative des intérêts des anglophones. Elle accuse même l'ONU d'avoir failli vis-à -vis des populations anglophones du Cameroun.

En décembre 1999, ce mouvement indépendantiste a même fait sensation, en déclarant symboliquement l’indépendance de la partie anglophone du pays. Il a hissé un drapeau dans la petite ville portuaire de Limbé, dans le sud-ouest. Là, aussi, le choix de cette ville ne devait rien au hasard. Car, les enjeux ne sont pas seulement politiques et culturels. Ils sont aussi économiques. Les anglophones estiment qu’ils sont assis sur des richesses, exploitées à leur détriment par les francophones. En plus de ses ressources halieutiques, la ville de Limbé est une région minière et pétrolifère qui abrite le siège de la Sonara (la Société nationale de raffinage). Autant dire, une mine d’or.

Pourtant, ajoute l’historien Yves Mintoogue, «face à ce contentieux majeur, l’État a surtout répondu par diverses formes de violences, qui sans apaiser les dissensions, les ont plutôt accentuées». Et de craindre que, au final, le pays se soit transformé en une véritable cocotte-minute. Mais pour le très médiatique politologue camerounais Aboya Manassé, enseignant à l’université de Douala, le Cameroun ne risque pas de connaître une situation similaire à celle de la Casamance au Sénégal, encore moins à celle qu'a connue les deux Soudans. Selon lui, les activistes anglophones n’ont pas de stratégie bien pensée. «Ils savent bien que Yaoundé ne leur accordera jamais l’indépendance. Mais ils font de la surenchère pour revenir au fédéralisme», soutient le politologue.

La vraie revendication, c’est le partage du pouvoir, et le contrôle de la richesse du pays

Paul Biya succède à Ahidjo en 1982. Deux ans plus tard, il supprime l’adjectif « unie » accolé au nom du pays. L’opinion publique anglophone est prompte à y voir une « annexion » et un « processus de francophonisation forcée ». Pour assurer un partage du pouvoir, une politique d’« équilibre régional » est pourtant mise en pratique. Puisque Paul Biya, un francophone, occupe le sommet de l’État, les postes de Premier ministre et de président de l’Assemblée nationale reviennent aux deux autres blocs que sont le Grand Nord musulman et l’Ouest anglophone. Ainsi, depuis le 9 avril 1992, tous les chefs du gouvernement sont anglophones. Pas de quoi pavoiser pour Julius, journaliste à Douala, qui estime que « les prérogatives du chef du gouvernement sont maigres » et qu’il « fait de la figuration ». Mais peu importe que ses attributions soient limitées : le poste est convoité.

Dans leur requête en séparation adressée en 2004 à la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), basée à Banjul, les activistes sécessionnistes du Southern Cameroon National Council (SCNC) se plaignent d’être traités comme des citoyens de seconde zone. « Pourquoi un anglophone ne peut-il pas occuper un ministère important au Cameroun, tel que l’Économie, les Finances ou la Défense ? » Le mémorandum dénonce également la politique d’aménagement du territoire. « Pourquoi n’a-t-on jamais construit un port en eau profonde dans la ville de Limbé (Sud-Ouest) ? » interroge-t-il. Ces dernières années, les rêves de développement de cette station balnéaire située à 80 km de Douala se sont ensablés dans les plages noircies par les colères du mont Cameroun.

Les touristes la fuient, au profit le Kribi, dans le Sud francophone, fragilisant ainsi une économie aujourd’hui très dépendante du poids lourd de l’agriculture qu’est la Cameroon Development Corporation (CDC). Très dépendante aussi d’une raffinerie à capitaux publics à laquelle l’État tarde à payer sa dette. « Comme souvent, conclut Julius, l’argent généré par la raffinerie a été dépensé ailleurs par le gouvernement et ne nous a pas profité. »

Le vivre-ensemble ploie également sous le fardeau des préjugés. On se plaint des difficultés d’intégration : « Au marché ou à l’hôpital, s’adresser aux gens en français est souvent perçu comme un manque de respect », explique-t-il. Cette attitude est née d’un ressentiment : dans le reste du pays, les gens ne font pas l’effort de converser en anglais, « alors, ici, ils prennent leur revanche en faisant l’inverse ». Arrogance, mais pas seulement. Les « Anglos » reprochent aussi aux « Frogs » (« grenouilles ») leur désinvolture et leur sens peu élevé de l’éthique. La mauvaise gouvernance est, selon eux, la conséquence de la « corruption de l’élite de langue et de culture françaises, qui n’a pas le sens du bien commun ».

Sécession, même les anglophones ont des avis partagés

Malgré tout, pas plus que le pouvoir le SDF, parti politique dont la basa est le Nord-Ouest, premier parti de l’opposition ne veut de la sécession. Viscéralement anglophone, Fru Ndi refuse de parler français mais s’est toujours démarqué des séparatistes. « Ils me reprochent de ne pas soutenir leur cause », résume le leader du SDF, qui, officiellement, milite pour un retour au fédéralisme. « Les francophones souffrent autant que mes autres compatriotes du centralisme du pouvoir, continue Fru Ndi. Au nom de quoi devrais-je leur tourner le dos pour ne m’intéresser qu’aux anglophones ? »

Les deux régions anglophones du Cameroun ne constituent pourtant pas un ensemble homogène. Officiellement, deux millions de Camerounais s’expriment en anglais (ils sont 6 millions selon le SCNC). Vivant depuis quatre millénaires au pied du mont Cameroun, les Bakweris du Sud-Ouest sont culturellement proches des Doualas francophones. En revanche, les Nsos de Kumbo (Nord-Ouest) ont, eux, des affinités avec les Bamilékés de l’Ouest, tandis que les éleveurs musulmans Fulanis sont apparentés aux Peuls du Grand Nord.

Entre décentralisation, fédéralisme et sécession, l’élite anglophone est donc partagée. Comme Paul Atanga Nji, certains ont un avis très tranché : « C’est un faux problème, martèle-t-il. Les deux régions anglophones représentent environ 17 % de l’électorat du pays. Pourtant, nous occupons près de 35 % des postes importants dans l’administration publique. » Ce proche du chef de l’État ne cache pas son agacement : « Les séparatistes exercent un chantage inacceptable à notre pays. »

Enfin, les sécessionnistes eux-mêmes sont divisés. Une multiplicité de petits mouvements rivaux, voire de francs-tireurs, se disputent les commandes. Qui de Chief Ayamba Ette Otun, chef du SCNC basé au Cameroun, ou de Carlson Anyangwé, est leur vrai patron ? En 1998, lorsque le président zimbabwéen Robert Mugabe accepte de les recevoir, les querelles de leadership finissent par l’en dissuader.

Côté francophone, la partition a évidemment peu de partisans, mais beaucoup prônent une plus grande ouverture à l’anglais. D’après certains, « Notre avenir est anglophone », « Nous avons tort de nous enfermer dans la langue française. Regardez nos étudiants, les portes des universités anglophones leur sont beaucoup plus ouvertes que celles de l’Hexagone. »

Cependant, en dehors de la menace sécessionniste, l'Unité nationale souffre aujourd'hui des effets du tribalisme. Le Cameroun, compterait plus de trois cents langues, soit autant d'ethnies. Le régime d'Ahmadou Ahidjo a joué sur les équilibres régionaux, adoptant par exemple au niveau de l'éducation, une politique de deux poids, deux mesures. Il faut reconnaître que cette politique a permis à des régions défavorisées, de se créer une classe d'élites. Au plan social, l'avènement du multipartisme a exacerbé les différences, non pas politiques, mais ethniques. Les hommes politiques favorisent un repli identitaire des communautés, pour mieux les utiliser. Le regretté Professeur Roger Gabriel Nlep, avait même développé dans plusieurs de ses écrits la notion de " village électoral " pour bien expliquer ce repli identitaire des hommes politiques camerounais.

Ainsi des regroupements à caractère culturel - mais réellement tribal ou régionaliste - naissent dans chaque région du pays : le pays Béti à l'Essingan, le pays Bamiléké au La’akam, le pays Bassa au Mbog Liaa, les Sawa ont le Ngondo, il existe une Dynamique Kirdi, tout comme le Mbam a son festival, les anglophones du sud ouest, leur SWELA (South West Elite Association) etc. Et comme si cela ne suffisait pas, à l'intérieur de ces regroupements, naissent des micro- regroupements qui précisent davantage les origines des uns et des autres sans oublier les liens de famille. Faits remarquables donc, toutes ces associations sont fondées, dirigées et créées par des hommes politiques, généralement ceux de la chapelle du parti au pouvoir.

L'Unité nationale, peut-on dire aujourd'hui, tient difficilement la route, car la majorité des Camerounais n’y est plus attachée. Elle serait menacée par les luttes politiques qui ne cessent de s'engouffrer dans les petites failles qu'elle présente, pour mieux détruire sa dynamique. Que se soit pour le problème anglophone ou pour les guerres interethniques, en l'homme politique, se trouve le mobile. L'homme politique peut cesser d'être un danger s'il évolue dans un système réellement démocratique, qui ne favorise pas les tricheries et la manipulation. Ce n'est pas encore le cas au Cameroun.

Pour tenter de trouver une solution à des revendications identitaires dans notre pays, il serait nécessaire de  renforcer la démocratie locale par exemple, par l’élection des responsables municipaux au suffrage direct ainsi que celle des gouverneurs de provinces. L’on peut également accélérer la décentralisation, celle qui permet aux populations camerounaises de participer à la gestion de leur entité territoriale de telle sorte que tout le monde se sente concerné par la vie de sa région et nécessairement par la vie du Cameroun.

Le dialogue apparaît comme une alternative aux velléités sécessionnistes, autonomistes et indépendantistes au Cameroun. Pour un pouvoir qui n’a particulièrement pas la réputation de négocier avec ses contradicteurs il est temps de parler avec la dissidence car, ceci constituera une avancée dont on ne saurait minimiser, ni la portée, encore moins l’impact. Le problème anglophone est celui du Cameroun et ce serait certainement une erreur pour le pouvoir de penser que c’est d’abord le "problème des anglophones" qui devrait d’abord être traité sur le plan ethnique et linguistique. Si sous d’autres cieux le dialogue a prévalu dans la gestion des questions importantes pourquoi ne pas y penser au Cameroun ? Cette option gagnerait à être mise à contribution dans une synergie gagnante pour la stabilité à la fois culturelle, sociale et économique du pays.

Conclusion

Un pays aussi ambitieux soit-il ne peut progresser si les conditions suivantes ne sont pas réunies à savoir:

  • la paix ;
  • l’unité nationale ;
  • l’esprit civique de chaque citoyenne et de chaque citoyen ;
  • la bonne gouvernance ;
  • la transparence ;
  • l’équité ;
  • le respect des valeurs républicaines ;
  • la promotion et la sauvegarde de l’honneur du Cameroun à l’extérieur de ses frontières;
  • la renaissance d’un État fort.
  • Ce n’est qu’à ce prix là que le Cameroun pourra être remis sur les rails du développement.

L’unité nationale résulte du fait d’accepter d’assumer la diversité de la société camerounaise qui est inscrite dans notre histoire. C’est une richesse, c’est une force. Nous sommes un peuple métis et les différentes communautés qui vivent sur l’espace camerounais se sont mêlées depuis fort longtemps. Il ne s’agit pas seulement de métissage biologique, mais aussi des emprunts culturels réciproques et très anciens. Célébrant la société arc-en-ciel, Nelson MANDELA a eu cette belle formule: « l’Afrique du Sud est une belle réalisation sur laquelle le soleil ne devrait jamais se coucher ». Je ne pourrais en dire autant pour mon pays le Cameroun, « cette Afrique en miniature ». Personne ne gagnera à opposer les camerounais entre eux ou à instrumentaliser l’ethnie. Nous devons éviter d’aborder nos problèmes sous l’angle des ethnies. Ce qui est en cause, ce n’est pas l’existence des ethnies qui font partie intégrante de notre histoire, mais plutôt le tribalisme. C’est contre le tribalisme que nous érigeons nous même. Pour que le Cameroun émerge, il est impératif que nous ignorions d’abord le tribalisme.

Notre obsession doit être l’unité nationale. Nous devons apprendre à vivre ensemble, en veillant à ce que tous les enfants de notre pays, quelle que soit leur histoire personnelle, leur origine ou leur croyance, soient considérés comme des filles et des fils de la république. Ils doivent être reconnus comme tels dans le droit comme dans les faits. Ayant inscrit l’unité́ nationale comme une de ses préoccupations, nous devons prendre l’initiative d’une révision de notre loi fondamentale pour extirper de notre Constitution tous les articles confligènes, donc susceptibles de faire peser une menace sur la cohésion nationale. Le respect des valeurs républicaines signifie en premier lieu le respect de la laïcité. Nous devons la protéger. Nous devons tous y veiller parce que la laïcité garantit la liberté de conscience. Elle assure la possibilité de pratiquer sa foi et d’être protégé dans ses croyances par la République.

Elle est un élément crucial de la cohésion sociale et de la paix. Nous devons nous féliciter qu’elle soit respectée au Cameroun, et pour cela nous devons rendre hommage aux Chefs religieux de notre pays pour leur sens des responsabilités et leur attachement à la paix, dans le souci de consolider notre volonté de vivre ensemble.

Pour conclure, j’envoie ce message à mes frères ‘‘Anglophones’’ : quelque soient les problèmes que vous rencontrez, ils sont les mêmes partout. C’est la mal gouvernance de ce régime, voilà le vrai mal du Cameroun. Pour ceux qui s’obstinent à se considerer anglophones plutôt que camerounais, ‘‘allow me to remind you that you have a very short memory because, before English Cameroon, and before French Cameroon, there was a country named Cameroon, as simple as that. We are, we’ve always been, and we’ll always be ONE PEOPLE, whether some likes it or not. Le Cameroun est, et restera un état indivisible, ne vous en déplaise. On aurait pu l’appeler République du Mbéato

Anecdote

Je devrais être appelé « MBÉATOÈ » au lieu de « CAMEROUNAIS », et voici pourquoi les lions indomptables devraient désormais s’appeler « LES CREVETTES ». Au VIème siècle avant J.C., un carthaginois du nom de Hannon découvre une chaîne montagneuse en fond de paysage du golfe de Guinée qu´il baptise Char des Dieux. Ce qui deviendra plus tard le Mont Cameroun. Au XVe après J.C, plus précisément en 1472, les explorateurs portugais découvrent un fleuve avec une extraordinaire population de crevettes au pied du Char des Dieux. Ils le baptisent aussitôt Rio dos Camaroes (Rivière des crevettes). Les Espagnols qui arrivent peu après pour déloger les Portugais adoptent le nom donné par ces derniers. Ce qui donne en espagnol : Rio de Camerones. En 1578, un autre peuple arrive du bassin du Congo et s´installe non loin de l´Estuaire. Cette fois les crevettes vont prendre le nom de MBÉATOÈ. En fait avec la colonisation, on nous appellerait, soit : Camaroes, Camerones, Mbéato, Kamerun, Camerounais, peu importe. Mais nous sommes d’abord les populations de cet espace géographique, et non des populations issues de la Grande Bretagne, ni de la France.

Vive le Cameroun

Long live Cameroon

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